La beauté sauvera le monde. Fedor DostoÏevski

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JEAN-MICHEL BASQUIAT

Credit photo : Scrubhiker (USCdyer) / https://www.flickr.com/photos/scrubhiker/9227850062

Véritable Rockstar de la peinture avant-gardiste américaine : Tout le monde s’arrache l’artiste Jean-Michel Basquiat tout juste âgé de 20 ans.
Inspiré par l’anatomie des corps, les évènements de sa vie et ses revendications contre le racisme, le peintre pionnier de la mouvance underground nous a laissé huit cents tableaux et mille cinq cents dessins orphelins.

Saluons la carrière courte mais fulgurante de ce peintre prolifique qui s’est éteint brusquement à l’âge de 28 ans.

D’une enfance bourgeoise à la rue

Jean-Michel Basquiat naît en 1960 à Brooklyn dans un milieu bourgeois.
Sa mère qui ressent très tôt son goût pour le dessin l’emmène souvent dans les musées.

Jean-Michel a 7 ans : Il manque de perdre la vie à cause d’une voiture qui le percute dans la rue. 

Il est blessé et souffre de lésions internes qui aboutissent à une ablation traumatique de la rate. 

À la clinique, sa mère lui offre Gray’s Anatomy, un manuel d’étude du corps humain. Avec les planches anatomiques de Léonard de Vinci, cet ouvrage a une influence décisive sur son style pictural et son intérêt pour la représentation abstraite des organes et des os. 

Le jeune garçon est un enfant hypersensible et très intelligent. Précoce, il sait lire et écrire à l’âge de 4 ans puis apprend couramment à parler anglais, espagnol et français.

Sa mère souffrant de troubles psychologiques, il grandit chez son père. Élève rebelle et facétieux, il est souvent renvoyé des établissements scolaires. Il fugue à répétition jusqu’à ce que son père le mette à la porte à 16 ans.

Dans la rue, il survit en vendant des T-shirts et des cartes postales de sa composition.

Il rencontre ses amis Al Diaz et Shannon Dawson avec qui il commence à graffer des messages de rue artistiques sous le nom de SAMO (same old shit, toujours la même merde).

SAMO plaît et se fait un nom dans le milieu artistique de l’East Village jusqu’à ce que le vagabond apparaisse dans l’émission télévisée de Glenn O’Brien et dans The Village Voice, un journal new yorkais. Celui qui n’avait pas d’argent pour s’acheter des toiles continue à graffer seul sur les murs jusqu’en 1979 où il écrit SAMO IS DEAD.

Artiste multi facettes, il crée Gray, un groupe bruitiste de free Jazz : un concept particulier de musique cacophonique. Les musiciens qui ne savent jouer d’aucun instrument se laissent porter par la musique qu’ils créent.

1980, acteur charismatique de 20 ans, il interprète son propre rôle dans le film Downtown 81 d’Edo Bertoglio.

Il commence à peindre sur toile et c’est une actrice du film, Debbie Harry, qui lui achète sa première œuvre.

S’en suit sa participation au Times Square Show, une exposition collective d’artistes qui le fait connaître et sa première exposition personnelle organisée par Annina Nosei à New-York. Basquiat fait la couverture du New York Times Magazine et reçoit un article extrêmement flatteur à propos de son art.

Une étoile est née : C’est la gloire, l’argent à gogo, les soirées huppées et la drogue en prime.

Tout comme le poète Verlaine, la drogue lui donne une inspiration psychédélique, une effusion de ses sentiments avec cette capacité à brosser la toile à une vitesse folle.

Celui qui choisit d’être noir

Jean-Michel Basquiat est connu pour être le premier peintre afro américain à succès.
En fait, il n’est pas noir, il est métis : Son père est Haïtien et sa mère Portoricaine.

Certains disent qu’il s’est forgé cette identité de noir par stratégie afin de tirer son épingle du jeu. Basquiat a toujours cherché la gloire. Il voulait être reconnu comme le peintre noir talentueux. 

Dans certaines de ses toiles, il dénonce le racisme et soutient d’autres talents noirs comme le jazzman Charlie Parker ou le boxeur Mohamed Ali.

Le peintre américain le plus cher de l’Histoire

Le jeune génie commercialise ses œuvres très vite et en quantité très importante de son vivant. Cette réussite fulgurante va lui rapporter des millions de dollars qu’il ne sait absolument pas gérer. Celui qui n’avait même pas de compte en banque entasse des liasses de billets dans son appartement et puis, surtout, il ne trouve pas sa place dans ce milieu élitiste d’artistes contemporains qu’il commence à fréquenter.

Influences et périodes artistiques

On considère trois périodes qui suivent son épisode Street Art.

D’abord il représente beaucoup de squelettes et de visages figés traduisant son obsession pour la mort et l’anatomie. Il peint aussi la rue qui était sa maison : voitures, jeux d’enfants, …

Ensuite, il va manipuler et peindre toutes sortes de matière : fenêtres, matelas brûlé au chalumeau, et il va revendiquer son identité noire.

La dernière période est différente : plus symbolique et figurative.

Dans les sujets de ses toiles, le jeune peintre est inspiré par la rue, ses rencontres et ses amours. Il exprime aussi beaucoup sa vie à Porto Rico où il a vécu quelques années et ses voyages à Haïti avec certaines toiles très naïves ou à tendance vaudou.

Il dessine la musique, ses sentiments déchirés, sa rébellion et sa non place dans ce monde.

Il est l’un des rares peintres à avoir su exprimer le cri dans ses représentations aux couleurs dissonantes et aux morceaux de corps explosés.

Jean-Michel Basquiat rencontre Madonna et Andy Warhol 

Rencontre sentimentale atypique : Madonna. Il est en couple avec Suzanne Mallouk lorsqu’il commence à fréquenter la Madone. Pour exprimer sa relation avec la belle aguicheuse, il peindra plusieurs toiles qu’il recouvre de peinture noire après leur séparation.

Le jeune Basquiat de la rue ferait tout pour rencontrer son idole Andy Warhol. Un jour, il passe devant une galerie dans laquelle il voit le peintre pop et il lui vend une de ces cartes postales.

Basquiat prend une photo polaroid de lui et Warhol et revient une heure et demie plus tard avec une toile les représentant tous les deux. Andy Warhol dira : “Il est plus rapide que moi”.

Les deux artistes atypiques passent de plus en plus de temps ensemble et deviennent de bons amis. Ils s’affichent sur la couverture des magazines et dans les lieux prisés du moment.

Leur rencontre marque une influence artistique et perso inconditionnelle dans la vie du jeune afro américain.

Ils vont peindre plus d’une centaine de toiles ensemble, mélangeant leurs deux styles si particuliers : le pop art de Warhol et le désordre expressif de Basquiat. 

Mais rien ne se vend. 

Les critiques incendient Basquiat traité de profiteur, de subalterne du maître Warhol. Jean-Michel qui voulait peut-être s’appuyer sur le succès du grand artiste aux cheveux blancs se retrouve plus bas que terre.

Les deux artistes se séparent.

Warhol meurt peu de temps après suite à une erreur médicale.

Très touché par sa disparition, Basquiat le rejoint un an plus tard : Une overdose d’héroïne aura raison de lui.

Le virtuose aurait la soixantaine aujourd’hui. Il aurait peut-être poursuivi avec une carrière d’acteur ou d’écrivain mais le destin a préféré l’immortaliser parmi les maîtres de la grande peinture.