Artman Times (A.T) : Monsieur Gloglo,
Nous sommes honorés de vous recevoir ce dimanche 26 février sur le plateau de l’émission : DE PASSAGE A PARIS, une émission du groupe média ARTMAN conçue pour inspirer, connecter et partager les expériences et le savoir de ces femmes et de ces hommes qui portent la vision d’un monde meilleur, et qui pour une raison ou une autre se retrouvent dans la ville de Paris pour un court ou long séjour.
Economiste, vous êtes diplômé de l’Institut d’Economie de l’Université d’Orléans (France) où vous avez obtenu un master 2 recherche en économie financière et monétaire. Vous effectuez actuellement une thèse de doctorat en macroéconomie monétaire au laboratoire de recherche GRANEM (Université d’Angers).
C’est sans dire que vous êtes le fondateur du think tank : “Cercle des Jeunes Economistes pour l’Afrique“, un creuset de réflexion panafricain indépendant et aussi du cabinet privé LLOG Advisory, spécialisé en conseil stratégique.
Sachant que la charité bien ordonnée commence par soi-même, vous avez récemment publié votre premier essai aux Editions Sydney Laurent, intitulé : “l’Afrique de nos rêves : chroniques d’un fils du pays”.
L’Afrique, dites-vous dans l’épitre liminaire, et sur un ton Nkrumahiste ne vous a jamais quitté, elle est en vous. Avant de renchérir un peu plus loin que tout comme chaque africain d’ici ou d’ailleurs, vous êtes l’Afrique.
Discours grandiloquent ? Discours réflexif ? Discours artificieux ? Discours politiquement correct ? Ou que sais-je d’autre ? En tout cas, à vous lire, vous ne prônez pas un éveil de consciences aveugle.
Economiste rigoureux,
Tête chercheuse,
Figure de proue d’une génération montante et militante,
Référence,
Intelligence stratégique,
Grande force de travail,
Franc-parleur,
L’homme de la situation peut-être,
M. Gloglo, vous cochez toutes les cases. Ce qui veut pour preuve votre présence ici aujourd’hui. Nous vous souhaitons donc le bienvenu, et sans plus tarder, nous allons entrer dans le vif du sujet.
Beringer Gloglo (B.G): Merci beaucoup, je suis très heureux d’être ici avec vous en ce début d’après-midi pour échanger sur les problématiques de développement socio-économiques en Afrique, puis parler entre autres de mon essai.
Mais avant tout je suis particulièrement touché par le descriptif que vous faites de ma modeste personne. Je suis très reconnaissant et si c’est ainsi que je suis vu, désormais, alors c’est que je ne mesure pas encore la portée des actions que nous menons et bien évidemment ce ne sont pas des réalisations personnelles. Il y a tout un groupe, parfois, derrière tout ça. Je voudrais donc aussi profiter de votre antenne pour remercier tous mes collaborateurs et tous mes proches qui font que je peux avoir tous ces qualificatifs aujourd’hui. Donc merci beaucoup.
A.T: C’est tout à votre honneur. C’est aussi un plaisir de vous recevoir sur cette émission, la première édition. Ca fait plaisir de partager une heure de conversation avec une tête pensante comme vous. Il s’agira de l’Afrique, il s’agira de vos réflexions, il s’agira de jeunesse africaine, il s’agira de perspectives, il s’agira tout simplement d’échanger entre deux personnes qui portent la vision d’un monde meilleur.
B.G: Entre deux fils du pays voulez-vous dire ?
A.T: Oui effectivement, car nous partageons les mêmes origines. C’est tout à notre honneur. Comme je le disais tantôt nous avons quelques questions à vous poser concernant déjà votre essai parce que ce n’est pas toujours facile de pondre sur des pages et des pages sa réflexion. Je sais ce que ça peut nécessiter en termes de capacité intellectuelle.
A.T : L’un de vos objectifs dites-vous est de redonner à l’Afrique ce qu’elle vous a donné. A quoi servent votre Think Tank et votre Cabinet de Conseil ?
B.G: Le “Cercle des jeunes Economistes pour l’Afrique” est un Think Tank qui regroupe, aujourd’hui, une diversité de jeunes économistes africains présents sur le continent et un peu partout dans le monde. Vous n’êtes pas sans savoir qu’aujourd’hui quand on dit africain ce n’est pas seulement sur le continent en Afrique, ce n’est pas seulement au Bénin, ce n’est pas seulement en Côte d’Ivoire, mais nous avons également des africains ici en France, comme vous et moi, au Canada, enfin aux Amériques, et dans beaucoup d’autres régions du monde.
Donc l’objectif de ce think tank, est de regrouper tous ces jeunes, toutes ces têtes pensantes, toutes ces compétences, pour réfléchir et proposer des solutions, des actions de politiques publiques innovantes pour le développement du continent parce qu’on a toujours fonctionné, malheureusement, avec des politiques “top down” c’est à dire tout nous descendait dessus.
On a fait l’expérience depuis les indépendances où on a eu par exemple les politiques d’ajustements structurels sans pour autant qu’on prenne en considération le désir, la volonté des africains. Donc nous nous sommes dit que c’est très bien si nous avons eu l’opportunité d’avoir l’expérience et d’acquérir la connaissance dans d’autres pays, maintenant il est important de se mettre ensemble pour combiner ses compétences et des réflexions pour pouvoir proposer des actions de politiques publiques innovantes, qui tiennent compte des réalités de nos pays, car ce n’est pas pareil pour quelqu’un qui a vécu au Bénin (en Afrique plus généralement) et qui est parti du Bénin, de produire une note économique que quelqu’un qui n’a jamais mis pied au Bénin de produire la même note.
Quand il y a une situation économique au Bénin, la perception n’est jamais la même selon qu’on soit resté un tout petit peu au Bénin ou selon qu’on ait touché aux réalités béninoises ou qu’on soit resté à New York ou à Pékin et qu’on regarde le Bénin depuis ces différents pays. Donc l’objectif du think tank est de regrouper toutes ces compétences pour produire des réflexions pour le développement socio-économique et surtout de montrer que les africains peuvent travailler ensemble parce que le think tank aujourd’hui regroupe des collaborateurs de différents pays.
Sur le continent nous avons des Maliens, des Burkinabé, des Béninois, nous en avons un peu de tout. Nous avons des collaborateurs en Afrique du Nord, en Afrique centrale, des Congolais, des Camerounais. Tout récemment, nous avons intégré des personnes résidentes au Madagascar, donc nous montrons également que les africains, contrairement à ce qu’on nous a toujours dit ou ce qu’on nous a toujours montré, peuvent se mettre ensemble pour travailler et aspirer à l’Union Africaine dont Kwame Nkrumah, que vous avez justement mentionné tout à l’heure, se faisait le promoteur. C’est ça que nous matérialisons parce qu’une chose est de vouloir quelque chose, de le dire tous les matins qu’on veut une union africaine, mais une autre est de le montrer.
Nous montrons également à travers ce think tank l’union africaine que nous portons. Voilà un peu, c’est la raison d’être du think tank. Aujourd’hui, nous avons passé un effectif de plus de 80 économistes (parce que nous avons procédé à un dernier recrutement) répartis un peu partout dans le monde et l’objectif d’ici la fin de l’année, c’est de doubler voire de tripler cet effectif parce qu’on a énormément de jeunes africains scientifiques qui ont la compétence, qui veulent contribuer au développement socio-économique du continent par la production de la réflexion. La réflexion vient toujours avant l’action.
Quand on veut agir, il faut déjà réfléchir et peser les pour et les contre, contrebalancer les idées pour voir quelle idée finalement nous permettra d’atteindre un objectif précis. Par ailleurs, à travers le cabinet que j’ai créé tout récemment, je travaille essentiellement avec des autorités de la politique publique, donc le président d’une institution ou le président d’une confédération de patronat par exemple. Récemment, j’ai été nommé conseiller technique à l’économie du président de la confédération nationale des employeurs du Bénin, donc le cabinet par exemple peut se positionner et être vraiment d’un appui très technique à cette personnalité et bien d’autres sur le continent.
Donc c’est de travailler avec les dirigeants, car vous pouvez avoir aujourd’hui à la tête d’une entreprise ou d’une institution financière quelqu’un qui n’est pas totalement financier et cette personne a besoin d’être aiguillée par moment et donc moi je peux avec ce cabinet apporter cet appui technique, mais en me basant sur la stratégie même de la personne. Si vous voulez on travaille directement avec la personne qui est en position de gestion d’une entité privée ou publique.
A.T: Le premier chapitre de votre livre est intitulé “rêve africain”. On entend souvent parler du “rêve américain”. Existe-t-il un rêve africain ? Et à quoi ressemble ou ressemblerait-t-il ?
B.G: Mais bien sûr qu’il existe un rêve africain, on ne peut pas vivre sans rêver. Vous savez vivre, c’est déjà commencer par rêver. Si vous voulez demain, par exemple, devenir un grand chef d’entreprise, il faut déjà commencer par vous dire je veux être un grand chef d’entreprise, c’est le commencement du rêve. C’est ça le rêve, je veux être quelque chose et une fois que j’ai décidé d’être cette chose, je vais par la suite me donner les moyens, les capacités d’y arriver.
Ca passera peut-être par la formation, le renforcement de compétences, la quête de l’opportunité parce que l’opportunité ne viendra pas forcément de là-haut, c’est à nous de créer l’opportunité donc le rêve commence par là. Et le rêve africain, je veux quand même d’emblée commencer par dire qu’il ne faut pas toute suite faire une analogie avec le rêve américain. Les Américains ont leur rêve, et certains le réalisent, c’est très bien.
Mais nous aujourd’hui notre rêve c’est quoi ? Quand vous prenez un jeune africain comme moi, pour une bonne partie, tout ce dont on rêve, c’est finalement être sur notre continent, déployer notre compétence sur le terrain, mettre la compétence au service du développement du continent et s’épanouir sur le continent, c’est tout.
A.T: Est-ce qu’il est partagé ce rêve, tous les jeunes africains sont-ils à ce même niveau de rêve ? partagent-ils la même réflexion ?
B.G: Si vous prenez par exemple, ceux qui vont vers des migrations que l’on qualifie souvent de “clandestins”, enfin qu’est-ce qu’ils recherchent ? C’est un emploi, vivre et survenir à leurs besoins. Le rêve c’est ça, c’est le rêve qui les fait partir. Seulement que ce rêve ils ont l’impression de ne pas pouvoir le réaliser sur place ou peut-être les conditions font qu’ils se disent, non, il est impossible de le réaliser chez eux. Ils se disent donc je vais sur une autre terre où je pourrai réaliser ce rêve, c’est exactement ça.
Donc le rêve n’est pas partagé que par moi, mais aussi par ces personnes. C’est vivre décemment, gagner sa vie comme on le dit, ne pas attendre tous les matins une période particulière pour qu’on nous donne deux sacs de riz ou un bidon d’huile.
A.T: En citant avec véhémence Fidel Castro, vous lancez un appel à la jeunesse africaine. “Tiens, prends et lutte de toutes tes forces pour conquérir la liberté et le bonheur” dit ce dernier. Dans le même temps, vous dissuadez cette jeunesse d’organiser au prix de son sang une “guérilla”. N’y voyez-vous pas une certaine contradiction entre ces deux appels ? Que répondrez-vous si cette jeunesse vous dit qu’il est impossible de faire des omelettes sans casser les œufs ?
B.G: Mais très belle remarque, vous savez quand on prend une affirmation, une citation, il faut la prendre, je le dis toujours dans le contexte actuel, celui dans lequel nous vivons. A l’époque, avec Fidel Castro, bon, ils ont fait une guérilla, mais aujourd’hui est-ce que nous avons la possibilité de mener une guérilla ? ça c’est la première question. Qui seront les premiers perdants, les vrais perdants si guérilla il y avait ? Donc quand on fait la combinaison de ces deux éléments, on se dit peut-être qu’organiser une guérilla n’est pas forcément le terrain sur lequel il faudrait jouer et je pense que…
A.T: Et si cela devenait obligatoire ?
B.G: Moi je suis un homme de paix et je pense qu’il n’y a rien qui puisse coûter la paix. Quand ça coûte au-delà de votre paix, c’est déjà trop cher. Donc je prône la paix, il faut tout faire avec la paix. Nous n’avons pas besoin de violence pour faire passer des messages.
A.T: parfois ne faut-il pas prendre les taureaux par les cornes ?
B.G: Oui mais prendre les taureaux par les cornes, ça ne veut pas forcément dire faire la guerre parce que quand vous faites la guerre…
A.T: Mais personne ne fait la guerre Monsieur Gloglo
B.G: Quand vous me dites que c’est contradictoire ces deux appels que je lance à la jeunesse, c’est ce que je vous réponds très exactement que la paix est toujours très importante. On peut négocier avec des personnes quand on est en paix. Quand un pays est en paix, et que tout va bien, on peut négocier et moi je trouve aujourd’hui qu’il y a un terrain sur lequel il faut beaucoup jouer, c’est le terrain de la production de la réflexion. Je pense que nos autorités de politiques publiques aujourd’hui ne sont pas totalement sourds à ce que nous disons.
Nous avons fait un travail récemment sur le modèle économique de la Caisse des dépôts au Bénin et nous avons été reçus par le ministre d’Etat en charge du développement et de la coordination du gouvernement, M. Abdoulaye Bio Tchané, et c’est quelqu’un qui nous a montré sa disposition, qui nous a dit clairement ” si vous avez des propositions, des travaux, nous sommes ouverts, vous pouvez nous proposer des choses”. Donc ça voudrait dire qu’aujourd’hui, il ne faut pas penser que les autorités de la politique publique sont totalement fermées. Il faut produire de la réflexion très sérieuse, très rigoureuse.
Toutefois, il y a aussi la façon d’amener les choses. Vous ne pouvez pas être un dirigeant et chaque matin attendre des propositions de part et d’autre. A un moment donné vous allez vous perdre. Moi je pense qu’il faut savoir raison garder chaque fois et il faut analyser les choses de façon très fine. Par exemple, si on vous nomme aujourd’hui à la tête d’une entreprise et que chaque matin vous avez des propositions qui viennent de partout, finalement ça va être compliqué de faire le boulot.
Donc il faut produire la réflexion, il faut savoir la manière d’amener la réflexion, le timing pour amener la réflexion. Il y a beaucoup de choses qui existent déjà dans nos pays, bien ou mauvais, ce n’est pas à moi de juger. Si on doit procéder à des changements, il faut savoir que les changements prennent toujours plus de temps, ça prend de l’énergie, et puis ça demande d’avoir des stratèges.
A.T: ça fait plus de 60 ans aujourd’hui qu’une bonne partie des pays africains ont accédé à l’indépendance, mais l’on a l’impression, je pèse bien mes mots l’impression que les choses vont un peu à tâtons.
B.G: Mais écoutez, 60 ans d’indépendance, alors certains ont l’habitude de dire que nos états sont relativement jeunes, encore que pour moi nos états n’existent pas qu’à partir de la date des indépendances. Ca c’est plutôt du côté de l’histoire, on ne va pas rentrer dans ça, sinon on n’est pas prêt de s’en sortir. Ce que je veux dire, il y a eu des avancées, mais la vitesse à laquelle on devrait s’attendre n’est pas la même. Les choses vont un peu plus lentement sur notre continent, dans nos pays et il y a pas mal de raisons qui expliquent cela.
Ces raisons peuvent être internes et externes. Nous avons notre part de responsabilité dans ce qui se passe et puis également on est dans un monde avec beaucoup de concurrence. Il y a des enjeux de géopolitique qui sont également présents et qui pèsent énormément. Vous prenez par exemple les questions liées au changement climatique, les pays africains je pense font partie des pays les moins pollueurs au monde, mais les efforts qu’on demande à ces pays parfois surpassent la pollution émise par ces derniers.
Vous savez nous rencontrons des difficultés en interne et quelques contraintes en externe aussi. Il faut le reconnaitre et le dire de façon très transparente à cette jeunesse africaine. Les choses vont lentement, moins vite qu’on l’aurait espéré, mais il y a des changements, il faut persévérer. Si on est dans une logique défaitiste, c’est sûr qu’on ne fera jamais rien.
A.T: Vous racontez aussi cette légende de Denis Kormann où le petit colibri devient un héros et un exemple à suivre. Même si le contexte n’est pas le même, cela me fait penser à cette phrase culte de l’ancien président français Jacques Chirac, qui disait : “Notre maison brûle et nous regardons ailleurs”. Insinuez-vous à travers cette légende de Kormann que l’Afrique brûle pendant que ses enfants regardent ailleurs ?”.
B.G: Non je n’irai pas jusque-là. Je dirai juste que l’analogie avec la légende amérindienne du petit colibri, c’est de dire que chaque africain où qu’il se trouve sur cette terre a la possibilité ou a une action à mener et son action est déterminante pour le développement socio-économique de notre continent. Je veux dire qu’il n’y a pas de petite action. Tout commence toujours par de très petites choses, Rome ne s’est pas fait en un jour comme on le dit. Donc il faut comprendre aujourd’hui que tout le monde a une place dans nos républiques, tout le monde à sa place et toutes les actions sont importantes.
Aussi petites qu’elles puissent paraître, elles sont toutes importantes. C’est ça je veux dire à travers la légende amérindienne et le colibri. L’histoire nous dit qu’au départ le colibri faisait quelque chose et ses collègues animaux dans la jungle se moquaient, parce que c’était tellement ridicule ce que faisait le petit colibri et les autres se disaient, non ce n’est pas possible, tu n’y arriveras jamais.
Mais finalement en faisant ça, il a donné un élan, il a suscité la solidarité de ses pairs. C’est vrai que la légende ne nous dit pas la fin s’ils ont pu éteindre le feu, mais au moins il y a ce truc et c’est ça ce qui est aussi intéressant dans cette légende. Il ne suffit pas de se dire aujourd’hui je fais une telle action dans le but d’avoir une réponse demain matin.
C’est ce que nous nous faisons par exemple dans le think tank. Nous produisons énormément de réflexions, mais parmi tout ce que nous avons produit, ce n’est que dernièrement que nous avons été reçus par le ministre d’Etat du Bénin. Si on c’était dit, on produit énormément mais on ne nous appelle jamais, là on ne serait pas parti. C’est ce que je veux dire, il ne faut pas forcément attendre un retour immédiat, il faut faire les choses en se disant que même si nous n’avons pas les fruits de ce que nous faisons aujourd’hui au moins les générations futures, nos enfants quand ils viendront, ne partiront pas avec une base zéro, il y aura quand même un travail déjà fait, c’est déjà quelque chose.
A.T: C’est un peu comme cette sagesse chinoise qui dit que celui qui a planté l’arbre n’est pas forcément appelé à bénéficier des fruits ou de son ombre.
B.G: Et d’ailleurs celui qui sait qu’il plante l’arbre pour ne pas forcément bénéficier de ses fruits immédiatement, c’est lui qui a compris la vie.
A.T: Vous n’ignorez pas non plus, qu’on n’est pas toujours prophète chez soi…
B.G: Mais ça c’est normal, c’est quelque chose que nous remarquons dans le travail qui est fait au quotidien. Vous savez au Bénin, on a été reçu récemment, mais il y a d’autres pays, comme je vous l’ai dit on ne travaille pas que sur le Bénin. Il y a d’autres pays où on est carrément rejeté et d’autres au contraire qui nous accueillent à bras ouverts. Mais il faut savoir que ça fait partie du processus. S’il suffisait juste de faire des choses pour demain matin avoir les résultats, ça deviendrait trop facile.
A.T: L’activité du secteur touristique en Afrique dites-vous dépend principalement des voyageurs internationaux. On ne peut quand même pas dire qu’il n’existe pas une classe moyenne en Afrique. Qu’est-ce qui pourrait expliquer ce fait ? Partagez avec nous deux politiques publiques concrètes qui peuvent être élaborées pour stimuler le développement du tourisme intérieur.
B.G: Vous savez le secteur touristique en Afrique, je trouve qu’il y a moins de débats autour de ce sujet, un sujet qui est quand même important, parce que nous avons les atouts pour faire émerger une économie du tourisme. Vous n’êtes pas sans savoir, vous prenez rien qu’au Bénin, les palais royaux, il y a beaucoup de choses à visiter. Seulement que quand vous regardez les pays qui profitent vraiment du secteur touristique, qui ont une économie touristique plus conséquente, qui va jusqu’à 10% de leur produit intérieur brut, ce sont des pays qui ont une base de consommation locale consistante, ce qui n’est pas forcément notre cas.
On met en place des complexes hôteliers ou des sites touristiques par exemple et l’on attend que ce soit les autres qui viennent visiter (consommer). Ça a toujours été la logique. Aujourd’hui, il y a des changements dans certains pays notamment le Sénégal, l’Ethiopie, le Rwanda, le Kenya, et le Bénin également qui est en train de mettre en place une politique très intéressante, mais quand vous misez sur vos locaux pour élargir votre base de consommation, il faudrait en même temps que le revenu de ces locaux augmente parce que quand vous avez votre revenu il y a la partie que vous affectez à la consommation et, la partie que vous affectez aux loisirs.
A.T : Je ne vous coupe pas Mr Gloglo, mais en France par exemple, à moins de me tromper, les gens épargnent pour s’offrir des vacances, cela ne veut pas dire qu’ils ont forcément des revenus conséquents.
B.G : Au-delà même de l’épargne, il y a des programmes comme vous le disiez tout à l’heure qui permettent aux gens d’accéder au panier des loisirs. Vous avez les chèques vacances dans les entreprises, moi je me rappelle, j’étais dans une institution de la République où à la fin j’avais un bon cadeau, un bon paquet de chèques vacances avec lesquels je pouvais m’offrir des destinations de ski et c’est ça qui nourrit le secteur touristique.
Si on met en place par exemple, la dernière fois quand on discutait sur le salaire minimum dans le pays, pour l’emmener à un certain niveau, je disais aux collègues que ce ne serait pas mal de mettre en place un système où les fonctionnaires ont des chèques vacances, des chèques pour visiter tel ou tel musée. Ça concrètement, donne un coup de pouce au secteur du tourisme. Ce sont des politiques qui sont totalement faisables, après il faut réfléchir sur l’élaboration de la chose.
Je pense que si on réfléchit là-dessus, on peut trouver des combinaisons totalement intéressantes pour stimuler l’économie du tourisme. Et ça, on peut le faire au Bénin, et dans d’autres pays comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire. La plus grande basilique du monde apparemment c’est en Côte d’Ivoire.
A.T: Yamoussokro, vous voulez dire ?
B.G: Oui…mais est-ce que tous les Béninois le savent par exemple ? je ne pense pas. Est-ce que tous les Maliens le savent ? non je ne pense pas. Il y a aussi les infrastructures de déplacement qu’il faut mettre en place. Là je faisais une tribune très récemment pour un magazine béninois qui est spécialisé sur les questions du tourisme, où je parlais d’Air Afrique qui a fait faillite. J’expliquais qu’Air Afrique était plus ou moins destiné à faire faillite vu le contexte dans lequel il émergeait.
Donc maintenant il est important de faire émerger des compagnies aériennes low-cost qui permettent de fluidifier le trafic. En chine le secteur touristique s’est énormément développé en local, en même temps quand vous lisez mon essai vous voyez que la Chine a construit énormément d’aéroports et de gares, de chemins de fers, ce qui permet de faciliter les déplacements entre les régions.
A.T: L’économiste Zambienne Dambisa Moyo a sorti en 2010 un livre super intéressant qui a été bien reçu par la critique. Dans “Dead Aid” ou “Aide Fatale” en français, elle montre pourquoi et comment l’aide au développement, depuis les années 1970, n’est pas efficiente et rend les africains plus pauvres. Elle fustige le fait que les prêts et les subventions encouragent la corruption et les conflits, et découragent les investissements.
Mr Gloglo, de vous à moi, l’Afrique a-t-elle aujourd’hui les moyens financiers de son développement ?
B.G: Oui clairement, l’Afrique a les moyens de son développement et puis sur les aides, est-ce que vous avez déjà vu un pays se développer avec les moyens d’autres personnes ?
A.T: Non…
B.G: ça veut dire ce que ça veut dire. Si jusque-là dans l’histoire de l’humanité il n’y a pas eu un seul pays qui s’est développé en comptant sur les moyens des autres, ça voudrait dire que ce n’est pas forcément quelque chose qui se fait et qu’il ne faut pas s’attendre forcément à ça, c’est tout. Vous savez la nature nous enseigne beaucoup de choses, il faut tout simplement observer. Nous avons cette aide depuis les indépendances et on n’est pas encore prêt de sortir de ça, mais les résultats montrent que malgré ces aides on n’arrive pas non plus au développement souhaité. A chacun de tirer sa conclusion.
A.T: Qu’est-ce qu’il faut donc mettre en place comme alternatives pour que l’Afrique puisse financer son développement sans forcément attendre un geste des grandes institutions financières comme on le voit souvent ?
B.G: Vous savez comme je l’expliquais dans mon essai, nous avons aujourd’hui des caisses de retraites, nous avons des caisses de sécurité chez nous, des fonds…
A.T: Qui dorment vous voulez dire ?
B.G: Je ne dirai pas qu’ils dorment. Ils ont une autre stratégie, tout simplement, ces fonds, on préfère les investir, pour acheter des eurobonds, acheter des obligations européennes, allemandes, américaines, et quand vous achetez ces obligations, vous financez la construction des autoroutes dans ces pays, vous financez ces économies pour être généraliste. Mais on peut faire la même chose chez nous et il y a beaucoup de choses qu’on pourrait faire.
Je pense qu’il ne faut pas forcément se dire qu’on doit commencer par avoir 100 milliards demain matin pour faire quelque chose. Vous savez nous avons des contraintes budgétaires, mais nous avons des leviers. Nous avons par exemple dans tous nos pays de l’Afrique de l’Ouest en tout cas de l’UEMOA, une caisse de dépôts. Tout ce qu’on retrouve en France, on peut quasiment les retrouver chez nous. Ce n’est pas toujours mauvais, parce que la caisse des dépôts a une ambition très noble et fait un travail remarquable dans le financement de l’économie en France, la réduction de la pauvreté et la limitation de la fracturation des classes sociales.
Donc si on a une caisse de dépôts dans nos pays c’est très bien, mais il faut aujourd’hui repositionner nos caisses de dépôts de sorte qu’elles puissent financer nos économies locales ou nationales. Et les caisses de retraites, les fonds de sécurité nationale, la liquidité qu’il y a à disposition, il faut trouver un moyen de les mettre au profit du financement de l’économie. C’est tout simplement ça, il faut plus de prise de risques, il faut avoir plus confiance aux entrepreneurs.
Nous savons que le financement par le secteur bancaire chez nous est très limité, le crédit bancaire rapporté au PIB au Bénin est de l’ordre de 15% il me semble sinon moins, c’est très faible en termes de ratio. Donc il faut aujourd’hui des instruments pour justement catalyser le financement de l’économie. La caisse des dépôts peut jouer ce rôle et puis il y a beaucoup d’autres institutions qui pourraient bien jouer ce rôle. Donc l’Afrique ne manque pas de moyens et ça c’est modulo le discours sur les détournements qui constituent aussi d’importantes sommes qui échappent à nos économies.
Quand vous faites la combinaison de toutes ces choses, il est quand même dommage de constater qu’on soit tous les matins en train de solliciter les autres alors qu’on pourrait agir. C’est vrai qu’on ne va pas tout faire du jour au lendemain, mais au moins mettre en place des mécanismes et une dynamique qui feront que d’ici dix quinze vingts ans qu’on n’ait pas encore à reprendre les mêmes choses.
Je peux comprendre qu’on sollicite aujourd’hui parce qu’on n’en a pas, mais si on met en place un mécanisme qui permet que dans les années à venir qu’on ne soit plus à ce stade c’est totalement louable.
A.T: Où en sommes-nous aujourd’hui avec l’Eco, supposé remplacer le franc CFA ? Est-ce un éléphant blanc ou c’est l’accouchement qui est difficile ?Le serpent se mord-t-il par la queue ?
B.G: Vous savez je fais ma thèse sur le Policy Mix dans l’UEMOA donc je travaille sur le franc CFA et jusque-là je n’ai pas l’habitude de me prononcer sur le franc CFA. Ce que je veux dire, lorsque vous entrez dans le système franc CFA, nous sommes dans une union monétaire avec les 8 pays, les 7 au départ, la Guinée-Bissau a rejoint après. Quand on est dans une union monétaire, on a déjà un ancrage fixe entre les pays membres de l’union monétaire. La particularité ou la spécialité de l’UEMOA, c’est qu’elle a un ancrage nominal externe en plus avec l’euro, ce qui est plutôt historique. Je veux préciser que ce n’est pas un discours de fanatique, panafricaniste sur les questions du franc CFA.
Je travaille vraiment sur le franc CFA et je parle en tant que scientifique. L’ancrage nominal externe à l’euro est plutôt un processus historique, ce n’est pas issu d’un arbitrage économique, c’est un héritage. Maintenant quand vous avez un ancrage à une monnaie, plusieurs raisons peuvent justifier cela. C’est la corrélation des cycles économiques, l’importance des échanges en termes de commerce.
Il y a par exemple ces deux éléments principaux qui peuvent justifier un ancrage, seulement que quand on regarde au niveau des échanges entre notre zone et les pays utilisant l’euro, finalement on voit que la relation commerciale n’est quand même pas assez forte que ça. Donc est-ce qu’il y a vraiment un intérêt d’avoir un régime fixe avec une zone avec laquelle on échange peu ? J’ai une étude en tête, je ne me rappelle plus l’auteur qui montrait que même depuis 1994, il y a une décroissance des échanges entre les pays de l’UEMOA et ceux de l’euro et qui montrait également que les cycles sont négativement corrélés entre ces deux zones, ce qui fait qu’au final on subit.
Quand nous sommes en expansion, les autres sont en récession et donc on subit la politique monétaire de la zone ancre. Donc si on entre dans un nouveau projet de monnaie où l’arbitrage n’est toujours pas très économique par rapport au choix du régime de change, il n’y aura pas de nouveauté.
A.T: D’accord, mais je vois que vous êtes resté très prudent sur la question…
B.G: Non pas du tout, je vous ai donné une réponse très scientifique tout simplement qui ne relève pas du fanatisme.
A.T: Nous en prenons note et passons à la question suivante
B.G: Non pas pour autant. Comme je le dis il y a la manière de dire les choses et la question du franc CFA il y a plusieurs volets. Moi je parle d’un point de vue purement d’économiste, chercheur, mais vous avez par exemple les historiens qui ont une dimension historique de la chose, vous avez des sociologues, vous avez les panafricanistes qui ont aussi leur propre vision de la chose.
A.T: Comment se porte le “Made In Africa” comparé au “Made Elsewhere” ? Quid de la zone de libre-échange continentale Africaine ?
B.G: Très bonne question. C’est vrai que la Zone de libre-échange continentale Africaine a pour ambition de limiter les barrières tarifaires et non tarifaires qui existent encore entre nos pays, qui sont d’ailleurs injustifiées, puis de faciliter les échanges entre nos pays et le continent dans sa globalité, mais une fois encore, moi j’avais toujours dit qu’on échange a priori des choses qu’on a pris le temps de produire. Si vous ouvrez un marché tellement vaste en termes de consommateurs et que vous n’avez pas grand-chose à proposer sur ce marché, vous libérez le marché mais vous n’avez pas grand-chose à proposer.
Cela voudrait dire que vous laissez la possibilité à d’autres personnes d’envahir le marché, d’occuper ce marché tout de suite et puis il suffit de faire juste un petit dumping fiscal et puis on baisse un peu les prix dans d’autres régions qui produisent parce qu’ils se disent bon là on ne va pas jouer sur l’effet prix, on va jouer sur un effet volume. On va baisser les prix mais comme on sait que le marché est tellement important en termes de consommateurs, quand on va envoyer même si c’est à bas prix (qualité inférieure en même temps, il faut le savoir), le marché devient inondé et on gagne. Donc je dis c’est très bien de casser et de limiter ces barrières, mais dans le même temps il faut intensifier la production.
Il faut mettre de vraies politiques d’industrialisation en place, car la nature a horreur du vide. Et surtout que ce sont des marchés où nous avons déjà des concurrents. Il y a déjà des acteurs prépondérants sur ces marchés. Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y avait une histoire comme quoi des pays d’Asie fabriquaient du Attiéké (farine de manioc). C’est un produit typiquement de chez nous ça. C’est typiquement ivoirien ça.
A.T: Selon ce que j’ai récemment lu sans pour autant vérifier l’information, la Chine serait le premier producteur du Attiéké au monde.
B.G: C’est bien possible, je n’ai pas vérifié, mais j’ai également eu l’information que des pays en Asie produisaient de l’Attiéké. Donc finalement vous libérez un marché énorme et puis d’autres personnes ont la possibilité de produire des choses que vous consommez en plus. Il faut donc mettre en place des politiques d’industrialisation très claires pour intensifier la production nationale et locale.
La zone de libre-échange continentale africaine est une très bonne chose parce que ça permet de limiter les barrières tarifaires et non tarifaires. je ne vois pas pourquoi il y aurait une barrière entre le Botswana et la Côte d’Ivoire ou même entre pays de la CEDEAO ou de la CEMAC. C’est un projet noble et ambitieux qui aura une grande valeur ajoutée pour le continent, mais il faut produire.
A.T: Qui parle en même temps d’industrialisation parle d’énergie…
B.G: On nous a toujours dit que l’Afrique n’a pas d’énergie, mais les africains marchent sur l’énergie tous les matins. Le sous-sol africain, c’est de l’énergie. Quand vous prenez le sous-sol de tous les pays africains c’est de l’énergie. C’est quand même assez délicat parce qu’on arrive à croire qu’on n’a pas des choses dont on dispose mais vraiment en abondance quoi. Bon l’uranium qui fait les centrales nucléaires dans les pays développés vient du Niger. Après, c’est vrai que l’uranium tout seul dans le sous-sol ne va pas produire de l’énergie.
Ca voudrait dire que là aussi il y a une politique à mettre en place pour former ceux qui peuvent partir de l’uranium et en faire de l’énergie qui sera mise à disposition pour le secteur privé, pour l’éclairage, pour les industries. Donc il y a une politique industrielle à mettre en place. Il faut une politique de formation du capital humain qui puisse faire vivre les industries.
A.T: Mr Gloglo, vous vivez à Angers, vous êtes de passage à Paris, qu’est-ce qui vous plait dans cette ville ?
B.G: Oh…Paris c’est une très belle ville. Comme vous le dites, Paris c’est la ville lumière.
A.T: Comme le disait l’écrivain américain Ernest Hemingway: Paris est une fête.
B.G: Moi j’aime bien la lumière et partout où on est illuminé. Je m’y plais bien. Donc c’est toujours un grand plaisir de passer par Paris puis de découvrir aussi d’autres choses, rencontrer d’autres personnes, parce que souvent quand je suis là c’est pour des activités professionnelles, donc je viens à la rencontre d’autres personnes pour des échanges intéressants comme celui-ci. J’ai pas mal d’amis à Paris, donc revoir tout ce monde au-delà de l’économie, des essais, des livres. Paris comme Abidjan ou Dakar ou Cotonou, c’est toujours bien de passer par un endroit où on a des attaches.
A.T: Nous tendons vers la fin de cette conversation. Que pouvez-vous dire sur l’état actuel de ce monde ? Et quel message affectueux portez-vous à son égard ?
B.G: Je pense que le monde est en train de se redessiner. Avant on avait une certaine organisation mondiale, mais aujourd’hui les choses sont en train d’être remises en cause et il y aura encore une nouvelle restructuration. Au cœur de tout ça, il faudrait que l’Afrique arrive à trouver sa place, son positionnement et l’impose. Avoir son positionnement, l’imposer, ça passe par ce que nous faisons déjà ici aujourd’hui. Donc faire passer des messages, conscientiser des personnes, partager la connaissance, il faut libérer le savoir, je tiens énormément à ça. C’est quelque chose que nous faisons d’ailleurs dans le Think Tank.
Nous encadrons par exemple des stages où on partage la connaissance. Nous avons l’ambition de lancer des formations pour des personnes qui ne sont pas forcément initiées à l’économie, mais qui veulent comprendre l’économie parce que c’est important chez nous. Nous avons dans notre groupe beaucoup de chercheurs en Economie, nous sommes en train de travailler sur la possibilité de faire des formations certifiantes pour ces personnes qui veulent comprendre l’Economie, comprendre leur environnement, les pays dans lesquels ils vivent, comprendre ce qui se passe réellement, qu’est-ce que l’économie de leurs pays.
A.T: C’est tout à faire louable d’ailleurs ces genres d’initiatives. Je pense qu’il faut effectivement libérer le savoir, parce que le savoir c’est une lumière, c’est un héritage qu’il faut passer d’une génération à une autre. Ce qui justifie d’ailleurs, nous, notre volonté de mettre en place ce média afin d’être ce canal par lequel l’information et le savoir peuvent être véhiculés.
B.G: Moi je vous félicite et puis je vous encourage très sincèrement pour cette initiative, pour ce que vous faites, parce que comme vous le dites, c’est vraiment un canal pour libéraliser l’information, la connaissance scientifique, permettre à l’Afrique de se repositionner dans un nouveau monde qui se redessine, ça passe aussi par ça, ça passe par le fait de permettre aux africains où qu’ils soient aujourd’hui de pouvoir comprendre certaines choses sur le continent, comprendre qu’aujourd’hui chacun a la possibilité ou que l’action de chacun compte pour le développement des pays.
On n’a pas besoin d’être à Paris ou d’être à New York. Une fois qu’on a des instruments comme le think tank par exemple où on peut travailler ensemble parce que comme je vous ai dit nous travaillons avec des personnes qui sont vraiment sur le continent et finalement ces personnes se confrontent, on échange des idées. Quand on a des sujets économiques, nous faisons des confrontations d’idées.
Nous avons une proposition, nous la discutons, chacun expose son point de vue et cela faisant on crée cet environnement qui va susciter un bouillonnement intellectuel. Finalement on va faire émerger des solutions innovantes pour le positionnement de l’Afrique dans ce nouveau monde qui se dessine, où elle (l’Afrique) s’impose et n’est plus en posture de receveuse où on a tout qui vient du top down.
Il faut du Bottom Up maintenant. Il faut que ça provienne de l’Afrique. Qu’est-ce que les africains veulent j’ai dit dans les premières pages de mon essai, les africains les jeunes en tout cas aujourd’hui, ce que je vois, n’ont pas encore défini clairement leur rêve.
Il faut que cela émerge parce qu’on a constaté que tout ce qui venait du haut jusque -là ne répondait pas forcément aux aspirations profondes des populations et c’est ça d’ailleurs qui crée des frustrations et des situations très compliquées sur le continent. Voilà et que la lumière jaillisse comme à Paris.
A.T : Nous vous remercions.